Une amitié.... inattendue...

Puisqu'on parle d'émotion à la chasse sur un autre post, j'ai envie de vous raconter une partie de chasse vécue par mon père au Tchad...

Cela remonte au premier voyage qu'il fit dans ce pays avec ses copains et l'illustre "Fredo l'Africain" dont je vous ai déjà parlé.
Emmenez mon père en Afrique n'était, au départ, pas évident... Car un de ses défauts, parmi beaucoup d'autres (j'ai pas hérité de tous ! ),
est qu'il était profondément raciste... Pour être sympa, je dirais qu'il avait peur du noir...

Donc, arrivés au camp de chasse, chaque participant se voit attribuer un guide... Mon père, 1,68 m pour + de 90 kg, se voit attribuer un
immense type, maigre, le visage couvert de scarifications, des couteaux sur chaque bras, et un manteau pur laine, totalement anachronique
vu la chaleur ambiante... C'était pas "gagné", il faisait peur !

Le lendemain matin, départ aux aurores pour une chasse à l'antilope ou phaco selon les opportunités.. Mon père, seul avec son guide.
Vous dire qu'il n'était pas tranquille est superflu, il avait même tellement la trouille que, longeant une haie parallèlement à une panthère
noire (pas celle de Fernand !), il préférait garder son arme plutôt dans la direction de son guide... Pas  du tout !

Il était près de 10 heures lorsqu'ils remarquèrent un troupeau de Cobs de Buffon... Commença alors l'approche, en rampant...
Arrivés à distance de tir réaliste, le guide observe le troupeau et signale (par le geste) la présence de 3 mâles, dont celui qu'il l'incite
à tirer.
Le coup part, le troupeau démarre dans un nuage de poussière et détale... Les 2 chasseurs se lèvent et vont voir.
A l'endroit où était le cob tiré, des tâches de sang... Mon père était bon tireur.
Le guide lui propose de suivre la piste du troupeau pour retrouver l'animal blessé tout naturellement... Ils entament donc la recherche.

Ils approchent à nouveau le troupeau et rampent pour se donner une chance de remarquer le blessé.. Le troupeau repart... rien...
Le guide demande (comme il peut) s'ils continuent la recherche, ce que, bien sur il accepte.

La même scène s'est reproduite plusieurs fois, le temps passait et le soleil tapait de plus en plus fort... Mon père avait du perdre au moins 5 kilos...
Mais il avait aussi remarqué que le troupeau semblait revenir à son point de départ... Nouvelle approche en rampant, même scénario...  

Cela faisait pratiquement 4 heurs que le "cirque" avait commencé... Alors le guide demande de nouveau à mon père, à bout de force, s'ils
devaient continuer... Et, encore une fois, mon père donne son accord.

Alors, le guide se lève, invite mon père à le suivre d'un geste, et le conduit, 50 mètres plus loin au cadavre du Cob !  
L'animal, bien tiré n'avait pas fait plus de chemin que cela, mais, pour voir ce qu'il "avait dans le ventre", il avait testé la volonté et les
qualités de chasseur de mon père...

De ce jour, ils ne se sont plus quittés... Mon père filmant beaucoup, il y a eu des scènes superbes... Jusqu'au départ...  
Il est coutumier d'échanger les couteaux, le guide a donc hérité du D'Estaing de mon père, et celui ci des couteaux, bien affutés fabriqués
à partir de boites de conserve du guide... Ils sont chez moi, accrochés au mur, encadrant le trophée du Cob...  

Mais le guide voulait autre chose, les chaussures de chasse de mon père... D'un petit 40, alors qu'il devait faire au moins du 46 !  
Qu'importe, il arriva à rentrer ses grands pieds dedans...  

Ce fut la fin du premier voyage... L'année suivante, le même groupe retourna au même endroit, et le grand bonhomme était là,
attendant mon père, pour repartir en chasse, avec ses chaussures au pied, dont il avait découpé l'extrémité et son pardessus
en laine, souvenir d'un autre chasseur...  

Mon père, malade, du renoncer à partir la fois d'après, mais quand le groupe arriva IL  était là..  
Apprenant l'absence de mon père, il repartit... SON chasseur n'étant pas là...

Il n'y eu plus de voyage au Tchad pour le groupe d'amis, et cette amitié née entre 2 personnes aussi dissemblables a prit fin.

Une belle histoire,
Merci setteroman.

belle histoire avec de l'émotion, merci pour le partage.

Non seulement le récit est super , mais c'est tout à fait le reflet de ce que l'on peu vivre là bas
Merci

Belle histoire ! Merci du partage

Ca faisait un bon moment que j'attendais de lire l'histoire de ton père Didier, ça valait le coup d'attendre ! C'est ça l'Afrique, c'est " plein", " entier",pas de demie mesure, pas de compromis.
Comme en amitié.
Merci beaucoup.
a+
jp

Il faut avoir été en Afrique pour comprendre ces gens. Rien que d'y repenser, j'en ai la chair de poule.
Merci à toi Didier d'avoir fait revivre ce beau souvenir

Très belle histoire, merci !

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Trophée (moyen) et couteaux photographiés à l'instant...

Superbe, des souvenirs qui doivent faire chaud au coeur !

Tout simplement Superbe Récit !

Une petite anecdote, qui ne mérite pas un post, que m'a rapporté mon copain guide de chasse avec qui j'avais rencontré Le Cerf, et qui montre la différence entre l'Afrique "profonde" et celle gangrénée par la corruption des dirigeants:

Il était sur une zone de chasse, et le village devait recevoir la visite d'un ministre.
Alors, le chef de ce village lui demande de tuer un buffle pour fêter l'évènement.

Lui, tout content à l'idée que les villageois allaient se payer un bon festin de viande
de brousse, s'exécute... Et rapporte le buffle au village.

Arrive le ministre et sa "suite", par hélicoptères... La visite fut rapide, et pas de festin...

Par contre, il lui fut demandé d'attacher l'animal sous l'un des hélicos, le festin
était bien prévu, mais au "palais" pour les "monarques"...

Très, mais alors très loin de l'esprit du guide de mon père ou des Massaïs de mon
ami JP.................

Rondeau a écrit:Il faut avoir été en Afrique pour comprendre ces gens. Rien que d'y repenser, j'en ai la chair de poule.
Merci à toi Didier d'avoir fait revivre ce beau souvenir

Tu as la même pensée que moi Rondeau.
Ne mettez jamais les pieds en Afrique....vous serez obligés d'y retourner !